Une fois n’est pas coutume, aujourd’hui nous allons parler de « bondieuseries ».
Dites-donc, c’est quoi cette mine dépitée ? Vous devriez plutôt prendre un air pieux et compassé. Je plaisante ! Moi aussi les vierges à l’enfant, les rosaces des transepts et autres travées (c’est où déjà ?), les Christs sur la Croix, et les milliers de saints, ça a tendance à me faire bailler….
Seulement aujourd’hui, c’est différent, il ne s’agit pas de n’importe quelles bondieuseries : ce sont celles du Trésor de Notre Dame de Paris. Promis on ne s’ennuiera pas !
Allez hop, c’est parti, suivez-moi !

Notre Dame de Paris
Nous voici dans la salle du trésor de Notre Dame de Paris, aussi appelée la Sacristie.
C’est rempli de beaux objets en or avec des petites pierres, par-ci par-là.
Ce n’est certes pas très grand mais bien assez pour y entasser pleins de babioles saintes : Pyxide (boite à hosties), Calice (verre à pinard – Oups pardon : sang du Christ), Chrémeau (fiole pour Huile Sainte bénie – et première pression à froid – je plaisante !), etc.
Tout cela sert aux diverses cérémonies religieuses et est placé sous la responsabilité du Chapitre (un collège de chanoines.).
Je ne vous cache pas qu’une fois passé le « whaou ! » de rigueur devant cette profusion, ben… on a vite fait le tour. D’autant plus qu’il y a peu d’explication et pas d’audio-guide, tssss…pas bien.
Heureusement il y a le clou de spectacle, c’est le cas de le dire : la relique et son reliquaire ! Et là les choses intéressantes commencent…

Burettes et plateau

Ostensoir offert par Louis XVIII
…Elles commencent à la persécution du Christ, pour être plus précis, lorsque les romains sont occupés à infliger au voyou de Nazareth une correction exemplaire :
« Tu te prends pour le roi des juifs ? Alors il te faut une belle couronne ! Tiens, mets donc celle-là, faite spécialement pour toi avec un beau tressage de jonc et plein de longues épines ».
Une centaines de coups de fouets et 3 clous plus tard, l’affaire était clouée, euh…bouclée.
Ce jour-là nous étions un vendredi (devenu le Vendredi Saint, jour de Pâques).
Ce fut le début d’une longue série de persécutions des chrétiens. Parmi les plus connus, il y a eu Saint Denis, premier évêque de Lutèce qui alla prêcher la bonne parole en Gaule, contre l’avis des romains. Résultat : on lui tranche le cou sur le Mons Martis, le mont des Martyrs, Montmartre, quoi !
Tous ces pauvres gens qu’on torture et qu’on exécute deviennent des martyrs, des saints (comme quoi il y a une justice divine !).
On se met à vénérer leur lieu de mort ou leur tombeau, et ces lieux deviennent des sanctuaires sacrés.
Puis l’empereur Constantin Ier arrive tranquillement au IVème siècle et décide de devenir catho.

Christ sur le chemin de croix, Raphael
Il demande à sa mère, Sainte Hélène, d’aller choper des restes de la Crucifixion du Christ : morceaux de la Croix, couronne d’épines, clous, etc.
Il lance alors la mode des reliques.
C’est LE truc tendance de l’époque, et qui va perdurer pendant des siècles (ça, c’est du lanceur de tendance ou je ne m’y connais pas !).
Le sanctuaire est devenu « Has Been », maintenant il faut exhiber sa relique.
Le problème c’est que c’est en édition limitée, forcement. Par exemple, pour la relique de luxe, celle du Christ, on ne compte guère qu’une vingtaine d’articles.
Alors comment fait-on ? Comme on fait aujourd’hui : de l’infâme contrefaçon !
C’est un marché très juteux. Imaginez le discours commercial ô combien vrai des revendeurs : venez acheter votre relique chers curés, vous multiplierez pas 5 votre nombre de pèlerins ».

Couronne d’épines du Christ
Cela nous amène à notre champion national de la relique, j’ai nommé : Saint Louis.
Nous sommes vers 1239, il profite que l’empereur romain de Constantinople (Baudouin de Courtenay) soit fauché pour lui racheter les reliques du Christ (cela lui coûte quand même la bagatelle de 65 milles livres tournois, soit 2 fois plus que la construction de la Sainte-Chapelle).
Saint Louis est un fervent catholique, premier roi capétien à se faire canoniser, excusez du peu !
Si vous aussi, vous voulez vous faire canoniser, suivez la méthode Saint Louis :
– Se faire fouetter avec des chaînes (la Discipline)
– Etre parti en croisade la majorité du temps
– S’habiller avec une vieille tunique blanche informe. Comment ça, comme un clodo ? Pas tout à fait : comme un moine de l’ordre des mendiants
– Faire l’ascèse (en gros, crever la dalle)
C’est sûr, ce sera plus facile si vous avez eu une mère qui vous a élevé dans une éducation religieuse méga stricte, du genre de Blanche de Castille (la mère de Saint Louis).

Discipline de Saint Louis

Tunique de Saint Louis
De relique en relique, cela nous amène au reliquaire.
C’est le joli écrin prévu pour la disposer, et que vous voyez décliné sous toutes ses formes dans la Sacristie de Notre Dame.
Ceux que vous pouvez admirer datent d’après la révolution, bien souvent du 19ème siècle. Et oui, comme d’habitude, les vilains révolutionnaires sont passés par là et ont tout cassé ou fondu pour récupérer le métal précieux… On avait bien recréé quelques trucs après, sous Napoléon I, mais cette fois ce sont les méchants émeutiers de 1830 qui ont fini le boulot.
Nous devons le plus spectaculaire reliquaire exposé ici à notre ami Viollet-le-Duc. Cette couronne – réceptacle en or – est montée sur un pied représentant Saint Constantin, Sainte Hélène et Saint Louis (les stars de la relique). Elle est prévue pour y déposer la couronne d’épines du Christ.
Il y a aussi un beau travail réalisé par J.-C. Cahier, sous le premier empire, et qui est très représentatif du travail d’orfèvrerie et de la symbolique de son époque. Tout y est : la couronne de laurier, les pièces de monnaies, les colonnes néo-classiques, etc., manque plus que l’aigle et les abeilles !
La production des reliquaires stimule le secteur de l’orfèvrerie. Les orfèvres se dépassent pour réaliser les plus belles pièces. Du coup, les objets de culte exposés sont un bon échantillon représentatif de ce qui se fait de mieux à chaque époque en terme de techniques utilisées.

Chasse de la Sainte Couronne d’épines dessinée par Viollet-le-Duc

Reliquaire de la Couronne d’épines de J.-C. Cahier
Bon, d’accord pour les reliquaires, mais où sont passés les reliques du Christ, me direz-vous ?
Pour ceux qui essaient encore d’écarquiller les yeux pour apercevoir la couronne du Christ, ou son morceau de chemise (moi aussi je l’ai fait, je vous rassure !), c’est peine perdue. Ils ne sont plus dans les reliquaires, trop risqué. Ils sont actuellement planqués dans un coffre-fort, lui-même planqué quelque part. Inutile de me demander où, c’est top secret, parait-il… J’ai eu beau minauder, insister, et même proposer de mettre leurs noms dans le Panthéon d’Histoire Très Personnelle, ils n’ont rien lâché ! (à mon avis c’est qu’ils ne savent pas où c’est, sinon ils me l’auraient dit, ça ne se refuse pas ce Panthéon-là !).

Les Chevaliers du Saint Sépulcre
On peut quand même voir ces reliques et leur faire un bécot tous les 1er vendredis de chaque mois ou chaque vendredi de Carême.
Mais gare à celui qui montrera trop de sainte ferveur devant les reliques, il pourrait recevoir une sainte baffe par les Chevaliers du Saint Sépulcre, qui sont les gardiens des reliques depuis la nuit des temps…
Notation et infos pratiques
Note : 4/10
Le plus : l’histoire des reliques est fascinante (Cf ci-dessus !) et les objets de cultes présentés sont à voir car de grande valeur.
Le moins : contrairement au reste de Notre Dame de Paris, l’endroit n’est ni grand, ni très joli (reconstruit par Viollet-le-Duc en 1845 dans le style XIIIème siècle). Les explications sont pauvres et assez ennuyeuses.
A faire (quand il pleut par exemple !), mais pas à refaire.Exposition
Dates : Exposition Permanente
Adresse : 6 Parvis Notre-Dame, Place Jean-Paul II, 75004 Paris
Horaires : du lundi au vendredi de 9h30 à 18h00, le samedi de 9h30 à 18h30, le dimanche de 13h30 à 18h30
Tarif : Plein tarif 3€, tarif réduit 2€
Tel : 01 42 34 56 10
Site web : http://www.notredamedeparis.fr/spip.php?rubrique21
Fraichement arrivée au 17ème siècle chez ma copine Marie de Guise, en ce week-end de Pâques, je comprends rapidement que je ne vais pas me …
Cette année je passe mes vacances de Pâques au 17ème siècle, chez ma copine Marie. Marie est une aristo qui met un point d’honneur à …
Je me sentais d’humeur philosophique et impertinente ce soir (comme souvent d’ailleurs… ). La dégustation de verres de Bordeaux, suivi de vers de Baudelaire, ont créé …
Ayant passé la nuit dans une petite auberge de Domrémy, le village de Jeanne, afin de l’accompagner le lendemain dans son grand voyage (Lire Jeanne d’Arc, …
la rencontre
Je l’avoue, j’ai été, peut-être comme certains d’entre vous (ça me rassurerait) une vilaine hérétique médisante. Je tenais Jeanne la pucelle pour une petite prude, …