La conciergerie… nom banal, anodin, un brin désuet et pourtant… Le concierge : charge courante, presque modeste et pourtant… et pourtant… dans la conciergerie où je vous emmène, ceux qui y entrent ont déjà un pied dans la tombe, et le concierge est au service de la mort. Vous venez de prendre place dans le train de l’enfer à destination de la Terreur, il est maintenant trop tard pour reculer ! Prochain arrêt : La Conciergerie. La Conciergerie : quelques procès d’arrêts. Les voyageurs voulant rester en vie sont priés de ne pas descendre du train ni de se pencher aux portières. Gardez bien votre tête… à l‘intérieur !
Allez hop, c’est parti, suivez-moi !
La Terreur a envahi la France… On l’appelle le régime de la terreur, car il se nourrit exclusivement de peur et de sang frais. Nous sommes en 1793 et ce régime vient couronner la tête d’un roi mort. La dictature au nom de la monarchie est morte, vive la dictature au nom du peuple ! Voici ce nom, ou plutôt ces noms : Marat, Robespierre, Herbert.… Toute une farandole d’allumés qui mènent la danse de ce régime sanguinaire où le jeu consiste à couper la tête du copain pour prendre sa place ; soit un jeu de trône musical où quand la belle musique révolutionnaire s’arrête, celui qui gagne est celui qui a encore sa tête !
Dans leurs règles du jeu ils ont inventés la case « Prison » aussi appelée « Conciergerie » dans laquelle on atterrit en piochant la carte « Tribunal révolutionnaire », autant vous dire que c’est une très mauvaise pioche ! Malheureusement, il y eut beaucoup de malchanceux, et pour cause, le jeu était quelque peu trafiqué… Premier arrêt : Nous voici devant cette case de l’enfer, n’est-elle pas d’une merveilleuse beauté vu de l’extérieur ? C’est un grand palais allongé paisiblement le long de la Seine sur la petite île de la Cité, en plein Paris. Il dresse à intervalle régulier ses grosses tours en poivrières, comme un sursaut de fierté pour nous rappeler qu’il fut le palais des rois de France, depuis les Mérovingiens au 10ème siècle, jusqu’à Charles V, au 14ème siècle. C’est dans son ventre de pierres que se situe la Conciergerie.
A l’origine, lieu où le Concierge (officier ayant la charge prestigieuse de garder le palais) avait ses quartiers, elle est devenue prison quand les rois ont foutu le camp au 14ème siècle.
Dès lors, elle vit passer moult prisonniers, depuis les pailleux, pauvres diables aussi fauchés qu’anonymes qui s’entassaient dans des cellules garnies de paille crasseuse, jusqu’au « people » historiques. Cela donne en vrac : Damien (qui a foiré son assassinat sur la personne de Louis XV), Ravaillac (qui n’a pas foiré son coup avec Henri IV), Cartouche (célèbre bandit, lire : Cartouche, un homme explosif), Lacenaire (autre bandit ayant sa petite notoriété), Charlotte Cordet (qui a assassiné Marat, lire : étrange histoire de décapitation), etc.
Bref, beaucoup de beau monde qui aurait presque fait de la Conciergerie « The Place to be » selon le comte de Beugnot : « On paraissait le matin dans un négligé coquet, dont les parties étaient assorties avec tant de fraîcheur et de grâce que l’ensemble n’indiquait pas du tout qu’on eut passé la nuit sur un grabat et le plus souvent sur une paille fétide. Les femmes du monde qu’on conduisait à la conciergerie y conservaient jusqu’au bout le feu sacré du bon ton et du goût ».
Notre joli comte nous sert de bien jolis contes, mais croyez-moi, de happy-end il n’y a point et les jolies princesses terminent raccourcies grâce à la magie de Mr Guillotin (député humaniste ayant fait adopté la guillotine comme unique procédé de mise à mort).
En effet, sous la Terreur qui gronde en cette période de l’Histoire, la Conciergerie ressemble plus à un cauchemar bien réel. D’ailleurs, entendez-vous tous ces cris ? Ils ne viennent pas de la Conciergerie, levez donc les yeux car c’est au premier étage que ça se passe. Voici le siège de la Terreur : le fameux Tribunal révolutionnaire.
Tchou-Tchou ! Attention chers voyageurs, le train redémarre, accrochez-vous bien ! Prochain arrêt : La Terreur…
« Quel est votre nom ?
– Je m’appelle Marie Antoinette de Lorraine d’Autriche.
– Votre état ?
– Je suis veuve de Louis Capet, ci-devant roi des François.
– Votre Age ?
– 38 ans. »
Il est 8 heures en ce pluvieux matin du 10 Mars 1793, une femme est assise dans un fauteuil monté sur une estrade. Quelques faibles rayons de soleil se laissent tomber de la fenêtre pour venir caresser ce pâle visage. Le bonnet de deuil, le châle de dentelle blanc ainsi que la longue robe noire rapiécée et amidonnée nous montrent une pauvre veuve mais le port de tête et la profondeur du regard nous démontrent une reine. Elle soutient avec calme les questions qui pleuvent comme grêle, seuls les doigts qui se contractent nerveusement sur le bras du fauteuil laissent paraître douleur et nervosité à l’observateur attentif.
Mais ce ne sont pas les tricoteuses, les poissardes, et autres grisettes amassées-là qui relèvent ce subtil détail, elles chuchotent : « Vois comme elle est fière ! ». La foule est venue en masse ce matin-là, chacun voulant approcher celle qui, quelques temps auparavant était leur reine aussi crainte que détestée.
Une voix s’élève, on lit le réquisitoire de Fouquier-Tinville, accusateur public de ce Tribunal Criminel Révolutionnaire réunit là : « Marie-Antoinette, veuve de Louis Capet, a été, depuis son séjour en France, le fléau et la sangsue des Français (…) elle a usé de toutes les manœuvres qu’elle croyait propres à ses vues perfides pour opérer une contre-révolution (…) ». Les accusations s’enchaînent, aussi accablantes que douteuses, salissant ceux-là mêmes qui les prononcent. La jolie dame fait calmement front en y opposant un front calme.
La noblesse de son attitude est tout ce qui lui reste de la couronne, mais quelle couronne !
La meute de chiens qui composent le Tribunal enragent d’autant plus qu’ils sentent bien la faible prise qu’ils ont sur leur proie. Hébert finit par aboyer : « Ces deux femmes (Marie Antoinette et Elisabeth de France – sa belle soeur), faisaient coucher le fils Capet (Louis-Charles, le fils de Marie Antoinette) entre elles deux. Là, il se commettait des traits de la débauche la plus effrénée ! Il n’y a point à en douter, puisque le fils Capet lui-même déclare qu’il y a eu un acte incestueux. ».
Si la femme jusque-là se montrait stoïque, la mère vacille et laisse échapper un « Oh ! » de douloureuse stupeur. Le président Herman, chef de cette meute, détourne l’attaque, comprenant le fâcheux de telles accusations soit disant portées par un garçonnet de 8 ans.
Mais, quelque temps plus tard, un bâtard ayant été nommé juré, ose revenir sur l’affaire :
« Citoyen Président, je vous invite à vouloir bien faire observer à l’accusée qu’elle n’a pas répondu sur le fait dont a parlé le citoyen Hébert à l’égard de ce qui s’est passé entre elle et son fils.
– Si je n’ai pas répondu, c’est que la nature elle-même refuse de répondre à de telles accusations faites à une mère. J’en appelle à toutes les mères ! » lance Marie Antoinette d’un ton vibrant.
Son éloquence involontaire, criante de sincérité fait mouche : la foule est touchée, elle s’indigne, elle gronde, elle devient menaçante, il faut évacuer la salle, vite ! Malgré cela, ce fatal coup de poignard au cœur, survenu après de longues heures de bataille inégale, laisse la pauvre accusée à moitié morte. Celle qui s’était levée dans élan sublime pour contrer l’affront est maintenant prostrée au fond de son siège, à bout de force. Le maigre soleil s’est éclipsé peu à peu, et a fini par disparaître, comprenant sûrement que seule la nuit peut à présent soulager de telles souffrances. Notre belle guerrière, qui se sait condamnée, s’y laisse doucement guider. Dans un souffle à peine audible elle articule : « J’ai soif ». Sentant l’agonie de leur reine, aucun de ces chiens révolutionnaires, plus teigneux que braves, n’ose bouger. C’est finalement un des gendarmes présents qui trouve le courage d’aller lui chercher un verre d’eau.
Tout s’enchaîne alors très vite, Fouquier-Tinville requiert la peine de mort d’une voix faible, le président Herman demande, comme s’il y avait là une quelconque possibilité de grâce : « Avez-vous quelques réclamations à faire sur l’application des lois invoquées par l’accusateur public ? ». Mais il n’y en a point, et Marie-Antoinette n’en veut plus, elle se contente de hocher la tête négativement.
Le couperet tombe alors, aussi tranchant que salvateur : « Le Tribunal condamne ladite Marie-Antoinette, dite Lorraine d’Autriche, veuve de Louis Capet, à la peine de mort. Le présent jugement sera exécuté sur la place de la Révolution, imprimé et affiché dans toute l’étendue de la République ».
Il est 4 h de matin, la nuit a depuis longtemps enveloppé la reine dans son grand linceul. En ce 16 octobre 1763, avec la mort et la sérénité pour compagne, elle quitte le Tribunal Révolutionnaire et retourne dans sa cellule de la Conciergerie :
« Je suis calme, écrit-elle, comme on l’est quand la conscience ne reproche rien ».
Mes amis l’heure est grave : je dois aller à Bicêtre, autrement dit, en enfer. Là où les condamnés comptent leurs derniers jours avant la …
Depuis quelques temps, malheureusement, j’ai pris l’habitude d’aller au Château de Vincennes. Pourquoi malheureusement ? Mais parce qu’il s’agit de rendre visite à mes potes en …
Il y a toujours eu des forbans, des bandits, des gangsters, des enfoirés…. Bref, si les adjectifs ont évolués, les forfaits sont toujours les mêmes, …
Voici une étrange histoire que je vais vous conter, qui fait suite à nos interrogations sur la résistance du corps humain (Lire Tortures en tout …
tout genre
L’autre jour un ami m’expliquait que bien souvent, lors d’un accident ou d’une souffrance violente, la personne mourrait avant même ladite souffrance ; la forte peur …
Même en plein mois d’août on a plaisir à trouver notre magasine historique favori. Pathétique période de l’histoire de
France mais que l’on ne peut occulter. C’est bien raconter, les petites pointes d’humour sont les bienvenues!
(en enlevant un « r » le citoyen Hébert se reconnaîtra!!)
voila l’affreuse histoire racontée d’une façon légère, mais poignante, comme on aurait aimé l’apprendre ainsi à l’école…..merci
Je ne sais trop quelle est la finalité de cet article. Celle-ci m’échappe.
Alors allons y « spontanément »!
Eh oui le siècle des lumières a fini par engendrer un monstre froid et sanguinaire.
Eh oui, à l’applaudimètre aujourd’hui Louis XVI l’emporterait sur Rosbespierre et les raccourcisseurs stakhanovistes.
Eh oui nous avons guillotiné un roi en 1791 et acclamé un Empereur tyran en 1805.
Eh oui les guerres expansionnistes de Napoléon ont fait plus de morts que la terreur.
Eh oui, les anglais ont occis plus de rois et de reines, et pourtant ils ont encore une reine qui soude la nation anglaise (remarquez que je n’utilise pas l’adjectif « britannique » à dessin).
Eh oui nous sommes fiers et claironnons partout notre déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen alors que la grande Charte anglaise (la Magna Carta) disant, mieux et de façon moins « universelle », la même chose, a géré la peuple anglais plus d’un siècle avant la DDHC et ils n’en ont pas fait une « tartine ».
Et oui les anglais sont de vrais démocrates qui n’ont pas cru devoir écrire une constitution pour en respecter les principes fondamentaux, alors qu’il nous a fallu trois révolutions, deux empires, cinq républiques et je ne sais plus combien de constitutions et de modifications constitutionnelles pour encore aujourd’hui ne pas respecter réellement » les principes fondamentaux d’une démocratie : quid de la séparation des pouvoirs, quid du respect des lois,etc…etc…
Nous sommes tellement démocrates que nous avons besoin de tout écrire et pensons qu’ainsi nous avons fondé la démocratie alors que dans l’âme, la France n’est pas réellement démocratique et serait plus proche du Bonapartisme !
Oui en France nous ne savons pas évoluer, nous révolutionnons ! Nous sommes à l’image de ces accumulations de tensions énergétiques dans les mouvements tectoniques et qui aboutissent aux tremblements de terre.
Eh oui nous sommes fiers de nos défaut et honteux de nos qualités !
Nous ne nous comprenons pas, les autres encore moins, et nous irritons universellement.
Une partie de nos dirigeants est encore coincée idéologiquement et culturellement au dix neuvième siècle de la lutte des classes, une autre élève l’écologie au niveau d’une religions proche de la doxa soviétique et l’ensemble pratique avec constance la lâcheté et et la démagogie pour flatter une nostalgie française d’un temps révolu et pour entraver la force progressistes dont le pays a un cruel besoin.
La révolution française a accouché d’une société qui a peur de son ombre et réclame protection à un état hypertrophié aveugle et sourd.
Nos hommes politiques n’arrivent pas à la cheville des constituants de 1791 et trahissent constamment les rêves et les idéaux des lumières.
Psychanalytiquement, la France est orpheline d’un Roi pour la rassembler et d’un Bonaparte pour la diriger.
En 1789, la France a tué le père mais n’est toujours pas devenue adulte.
Et non nous ne sommes pas les meilleurs et, loin s’en faut
tous les ans je commémore cette injustice, tant pour le Roy, que pour la Reine, je vais à la messe à St Denis et passe ma journée à Versailles, au hameau…merci pour cet article.